#AFRIQUE – Le Point a publié une tribune très intéressante de Stéphan-Eloïse Gras et Gilles Babinet, sur l’essor du continent Africain. Extraits
« Que se passe-t-il lorsqu’un continent comprend tout à la fois une part de génération X,Y,Z qui est presque le double de tout autre région de la planète et que ce même continent est aussi celui qui comprend le plus d’entrepreneurs au monde ? Et que se passe-t-il lorsque ce même continent accède massivement aux technologies de l’information ?
« Litanie d’innovations africaines »
Il se pourrait bien que la conséquence en soit une révolution innovatrice comme l’on n’en a jamais encore rencontré ailleurs. L’Afrique se réveille, et ce réveil ne fait que commencer. Si le service de banque mobile MPesa inventé au Kenya et en passe de devenir un succès planétaire vient immédiatement à l’esprit lorsque l’on parle d’innovation africaine, il n’en masque pas moins une litanie impressionnante d’innovations : des procédés de détection de faux médicaments (MPedigree) connaissent une croissance spectaculaire sur une dizaine de pays au point d’être nominés sur la très sélective « change the World list » du magazine Fortune aux côtés de Coca-cola, Intel et Nike. Au Cameroun, le Cardiopad permet de faire des examens de type électrocardiogramme à distance. Commercialisé en 2014, l’appareil s’exporte désormais dans de nombreux pays, dont l’Inde et le Canada.
Quiconque irait visiter les villes de Nairobi, Lagos, Le Cap ne pourrait pas ne pas observer l’effervescence particulière que l’émergence d’écosystèmes de start-up suscite. Ce n’est probablement pas un hasard si Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, a consacré récemment une semaine entière à visiter les zones les plus emblématiques du développement numérique africain, au Nigeria et Kenya. Mais ce que lui et de nombreuses autres personnalités viennent observer n’est pas tant le développement récent de start-up africaines comme on en observe partout sur terre, que le modèle d’innovation particulière avec lequel celles-ci se développent. Ce qui fascine, c’est ce que l’économiste Alexander Gerschenkron appelait « l’avantage de l’arriération ». L’expression, inlassablement rappelée par Lionel Zinsou, le patron de PAI Partners, signifie que « le fait d’avoir pris du retard permet de sauter certaines étapes et d’adopter immédiatement des technologies plus avancées, souvent développées sur place ». Or, en accédant aux réseaux 4G pour ainsi dire simultanément aux Occidentaux, en disposant de services numériques qui n’existent pas même en Occident, les Africains ont clairement démontré qu’ils effectuaient un « saut de grenouille » pour reprendre l’expression anglo-saxonne, effaçant les 60 ans de technologie de télécommunication à base de fils en cuivre qu’ils n’ont que faiblement mis en place.